Je ne sais pas comment résumer cette conversation. Probablement comme les autres. Une joute argumentaire épuisante.
Lundi soir, dîner sur la terrasse, sans télé, sans musique, juste lui et moi. Je profite du calme pour orienter petit à petit la conversation vers sa cousine, le courage qu'elle a de faire actuellement pour son stage 4h de route par jour et l'admiration que j'ai de leur couple de savoir tout remettre en cause pour elle, pour qu'elle puisse ensuite trouver le job à la hauteur de ses sacrifices. Lui : "évidemment, ils ont fait un mauvais choix au départ en s'installant là-bas ! C'est trop loin de tout". Pour lui, la comparaison n'existe pas puisque NOUS nous sommes BEAUCOUP mieux situés, bien plus près de la grande ville qui m'attire... C'est certain, au lieu de mettre 2h le matin pour m'y rendre, de mon côté je ne mets qu'une heure trente. Soit pour un aller-retour 3h au lieu de 4... C'est mieux mais est-ce bien pour autant ? C'est certain aussi que si l'on considère seulement la distance sans embouteillage entre notre domicile et cette ville on est censé mettre encore moins de temps (mais qui part bosser en dehors des heures de pointe ?).
Je dis que je me sens mal ici. Que je m'y ennuie. Il répond qu'il ne m'a jamais mis le couteau sous la gorge, que c'est moi qui ai choisi cet endroit et qu'à L. ou M. je m'ennuierais probablement autant étant donné que je n'y ai pas plus d'amis qu'ici. Je réponds que j'étais persuadée que nous ne trouverions pas dans nos tarifs ici et que je l'ai laissé cherché parce qu'il était devenu insupportable tournant en rond dans cet appartement comme un lion en cage réclamant plus de liberté. Mais que je n'imaginais pas que nous trouverions une maison aussi vite. Il ne se souvient pas avoir été invivable, dit que j'exagère. Il argue que de toute façon nous n'aurions pas les moyens d'habiter là où moi j'aimerais, que nous avons de la chance d'avoir cette maison. Il dit aussi que de toute façon je me lasse vite et que si ça se trouve, en partant habiter dans cette ville, au bout d'un an ou deux j'aurais ce même sentiment, cette même envie de partir encore ailleurs. Je réponds que je suis peut-être comme ça au fond de moi et que je n'y peux rien. Que je suis peut-être plus faite pour une vie un peu plus nomade... Il répond qu'alors j'ai tout raté, que je suis complètement à côté de la plaque. Il me regarde et ne comprend pas ce que je fais là si c'est une vie nomade dont j'ai besoin. Certes. Je n'en étais pas consciente tout simplement... Je réponds que j'ai toujours suivi les voies, les rails sur lesquels on m'a mise. Que je n'ai autour de moi aucune référence d'une vie "différente" et que je ne pouvais donc que difficilement envisager "autre chose" et puis qu'on évolue. Je sens que je n'ai pas d'argument "concret" sur ce thème, que c'est juste du ressenti et que le ressenti... Difficile à faire passer.
Je passe sur le côté professionnel, argumentant que je ne trouverais jamais un vrai poste dans le secteur qui me branche à un salaire décent ici. Il dit que je me mets des barrières toute seule. Que je pars battue d'avance. Qu'il n'y a pas de raisons que je ne trouve pas (ah, et mettre une première fois 9 mois pour trouver un job correctement payé mais pas des plus passionnant puis 6 mois pour trouver un job précaire à peu près interessant et encore... mais payé à coup de lance pierre, ce n'est pas un signe que trouver un job intéressant et bien payé risque d'être du niveau de l'impossible ?). Il dit qu'il ne m'a jamais empêché de chercher du boulot dans cette ville et que je peux très bien y bosser si je veux. Evidemment, ce n'est pas lui qui se taperait les trajets. Il répond qu'il est sur la route toute la journée pour son boulot et qu'il va très souvent dans cette ville. Oui, mais son trajet fait partie de son temps de travail et cela fait toute la différence à mon sens. Pas au sien. Je l'ai fait pendant 2 ans, me levant à 6h30 pour rentrer le soir à 7h45, ayant encore le repas à préparer et la vaisselle à faire... Et j'avoue avoir du mal à envisager de recommencer à ce rythme, surtout si un enfant venait à compléter le tableau. Quant à chercher du boulot carrément ailleurs, il ne se souvient absolument pas avoir dit un jour, lorsque j'ai répondu à une annonce loin d'ici et que nous habitions pourtant encore en appartement "et comment tu fais si c'est toi qu'ils choisissent ? Je t'avertis, si tu pars, ce sera sans moi". Des menaces dont il n'a aucune mémoire mais qui moi, ont guidé mes pas pour ne pas en faire un de faux. Pour rester dans ce qui était "raisonnable" à ses yeux. J'ai fini en pleurant en disant que je voudrais seulement sentir chez lui "une porte ouverte" vers un possible "autre chose". Il dit que pour l'instant la question ne se pose pas donc à quoi bon se prendre la tête à la fois sur le passé que je ne fais que "ressasser inutilement" selon lui et sur des choses hypothétiques ? A quoi bon en effet...
Ce matin, une sensation de malaise. Autant lui avoir "avoué" que j'étais mal depuis deux ans m'a soulagée, autant cette conversation là me renvoie à tout ce que j'ai raté. Comme si tout ça n'avait tenu qu'à moi et qu'il n'était pour rien dans mon malaise. Au fond ce n'est pas totalement faux. Je ne peux m'en prendre qu'à moi d'avoir été si faible. Je ne peux m'en prendre qu'à moi de ne plus savoir ce que je veux, ni quoi faire, ni où aller. Conversation stérile ? Inutile ? Aussi épuisante en tous les cas que la lecture de ce post un peu trop long...
c'est sur. je t'envoie un mail titi, ma reponse serait trop longue.