• 9h. J’arrive au bureau. Un nouveau message d’O. est dans ma boite mail « Finalement, le fond de la question est : “ oserez-vous braver les travaux, la circulation routière ralentie, les problèmes de stationnement pour un verre en terrasse – sans marteau piqueur à proximité quand même – d’ici mi-juillet ? » etc, avec plusieurs options possibles. Ce matin, il se trouve que je dois me rendre en ville pour récupérer des documents. J’hésite. Je me dis que non, pas tout de suite. Et je ne réponds pas encore. Ne rien précipiter. Rester calme.

    10h. Je pars du bureau. Sur un coup de tête de dernière minute, je reviens vers mon ordinateur et envoie un mail pour l’informer que je serais probablement à proximité de ses bureaux vers 11h après mon RDV professionnel et lui laisse mon n° de mobile. Après tout, c’est vrai que je descends rarement en ville en pleine semaine et en pleine journée. Une telle occasion ne se reproduira pas de si tôt à moins de la provoquer, et je ne veux pas forcer les choses. Quelques minutes après, un texto fait vibrer mon téléphone « j’ai un déjeuner à midi place y, mais on peut se retrouver au café bidule à 11h15 si vous êtes dispo ». Sourire. Un brin d’excitation me titille. Je me raisonne. Je me calme. Il faut à tout prix que j’évite d’entrer en mode séduction. Ne pas faire les mêmes erreurs qu’avec Petit Prince et devenir peut-être amis, tout simplement. Et puis peut-être, d’ailleurs, que ce rendez-vous sera le seul. Alors en profiter tout simplement. Sans se prendre la tête.

    11h. En sortant de mon mini-rendez-vous, je prends une grande respiration et je l’appelle. C’est plus facile que je ne l’avais imaginé. Quelques minutes plus tard nous voilà attablés en terrasse. Il est toujours aussi souriant et agréable que la dernière fois. De mon côté, je suis moins troublée, plus naturelle que lors de ma visite dans sa société où il m’a présenté ses travaux. J’arrive à parler sans bafouiller cette fois ! Je scrute ses défauts pour démystifier la bête. C’est vrai qu’il n’est pas si beau. Rien d’extraordinaire après tout. Juste ses yeux. Surtout ses yeux. J’évite de planter mon regard dans le sien. Cela n’arrivera qu’une ou deux fois, et encore, un regard à peine plus appuyé. Discret. Sans insister. Nous continuons de nous vouvoyer. J’ai parfois envie de lui dire « on va peut-être se tutoyer, non ? » et en même temps, le charme que cela donne à nos échanges, la distance que cela permet de conserver, font que je n’ose pas. Je préfèrerais que cela vienne de lui. Mais je pense qu’il ne le fera pas. Pas aujourd’hui en tous les cas. La conversation glisse facilement. Il est aussi bavard que moi. Je glane quelques informations sur son âge, son parcours, ses ambitions. Apparemment, il est en phase de remise en question professionnelle. Il parle même éventuellement de partir de cette ville, dont il est originaire mais dont il voit aussi les limites. Il me parle de son expérience à Paris, de cette opportunité raté à Casablanca, me demande si de mon côté je serais prête à partir pour évoluer professionnellement (il connaît le peu d’affection que j’ai pour cette ville). J’en profite pour glisser « si j’étais seule, oui, certainement. Mais je ne le suis pas, donc c’est plus difficile ». Au moins, je recadre un peu les choses. Je peux me dire « ça, c’est fait ». De son côté, je n’ose poser aucune question plus personnelle. Je ne sais pas s’il est toujours avec cette femme que j’avais entr’aperçu l’an dernier. Je me dis que pour envisager de partir, c’est peut-être lié aussi à une rupture sur le plan personnel. Mais je ne veux pas me faire de films. Juste apprendre à le connaître. Cela me suffit.

    12h10. Notre rendez-vous s’achève. Il s’excuse de ne pouvoir m’inviter à déjeuner car il a un repas pour son boulot. C’est mignon, parce qu’après tout, c’est moi qui l’ai pris un peu de court et il n’était pas prévu que nous déjeunions ensemble de toute façon. Je lance avec un grand sourire « ce sera pour la prochaine fois ! ». On se fait la bise (gros progrès car auparavant, nous nous serrions la main !) et je m’éclipse.

    14h. J’envoie un court message pour le remercier de cette agréable pause. Pendant plus d’une heure, je n’aurais de cesse de guetter sa réponse. Je me dis que je suis ridicule mais je ne peux m’empêcher de ressentir au niveau de la poitrine un petit pincement de cœur.

    15h42. Son nom s’affiche sur mon écran : « Le plaisir était partagé… vous voyez je viens seulement de rentrer de mon déjeuner – ce sera une journée placée sous le signe du soleil et de la détente !  Il faudra remettre ça avant le xx juillet : j’ai votre numéro de portable, et voici le mien, au cas où vous ne l’auriez pas : 06 xx xx xx xx. Bonne après-midi également, à très bientôt ! ».

    Il est presque 18h. Je l’aurais fait attendre, moi aussi. Et plus que lui encore ;-) Après tout, chacun son tour. Je vous laisse. Je vais me pencher sur une petite réponse pour clore cette agréable journée…

     


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  • "Ah ! Je suis sûr que vous aurez bien l’occasion de passer par le centre ville d’ici les vacances (mais je vois effectivement que vous êtes une inconditionnelle du shopping pour oser braver les travaux actuellement). Si tel n’est pas le cas, ce sera moi qui irai vous débaucher au xxxx (mais y-a-t-il un café sympa pour trinquer dans ce quartier ?)…

    Je compte bien sur votre appel !
    A bientôt !"


    Je lis et je relis son message... C'est bien une invitation... Croyez-vous que ce soit juste pour entretenir de bonnes relations avec notre entreprise, potentiellement cliente de la sienne ? Je n'en ai pas l'impression et je n'ai pas envie de le croire même si je ne peux m'empêcher de penser à cette option. En même temps, je doute qu'il invite tous ses clients passés et / ou potentiels à boire un verre, nan ?

    La balle est dans mon camp. Encore une question ouverte dans son message qui appelle à priori une réponse... Et si je l'ose, bientôt l'appeler pour qu'on aille boire un verre ensemble avant les vacances d'été.

    Jusque là, rien de bien méchant non ?

    Un tout petit rien, de rien du tout, qui met un peu d'excitation dans ma journée et un grand sourire sur mon visage.

    Comme quoi, il m'en faut peu.

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  • Vous souvenez-vous du bel O. ? Cette relation professionnelle sur laquelle j'ai fantasmé quelques jours il y a quelques temps au point qu'il était même venu hanter deux de mes rêves ? Plus de nouvelles depuis un bon moment, car plus de relations client / fournisseur. Et là, à l'occasion d'un mail à tous leurs clients, voici l'échange que nous venons d'avoir ces quelques dernières heures. Je n'y crois pas... Ca ressemble à une invitation... Nan... Pas possible. Si ? nan...

    Pfff. Voilà. Maintenant je suis toute fébrile et j'attends une réponse qui ne viendra probablement pas de si tôt. C'est ridicule n'est-ce pas ?

    De : l’équipe Bip bip
    A : tous les clients

    Bonjour,

    Comme chaque année, les vacances approchent avec les beaux jours et nous vous informons que bip bip sera fermée du tant au tant 2006.
    Nous sommes à votre disposition pour planifier ensemble la bonne réalisation des travaux en cours ou à venir pour cette période.
    Vous remerciant de votre compréhension,

    Bien cordialement.

    De : titi
    A : le bel.O

    Bonjour O,

    et par avance, bonnes vacances J
    !

    Titi

    De :
    O.
    À : titi

    Merci titi, bonnes vacances également… c’est vrai qu’on commence à y penser, non ? A défaut d’y être tout de suite !

    Amicalement,
    O.

    De : titi
    A : le bel.O

    Oh que oui on commence à y penser très sérieusement même ! Je dois aussi attendre fin juillet. J-XX pour moi aussi J
    !

    Amicalement,
    Titi

    De :
    O.
    À : titi

    Vous voyez, on arrive à parler plus de vacances que de travail ! Je crois que je vais cocher les jours sur un calendrier mural…  alors si vous passez dans le coin, en centre ville, faites moi signe, on ira boire un verre en l’honneur des (futures) vacances !

    A bientôt !
    O.

    De : titi
    A : le bel.O

    Je descends rarement en centre ville en semaine pour le boulot (plutôt le samedi pour faire du shopping vous avez du le remarquer ;-) et ce samedi encore d’ailleurs je dois y retourner !!!) mais c’est avec plaisir que je « trinquerais » avec vous à ces vacances tant attendues !

    Alors à très bientôt !
    Titi.


     

     

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  • Plus de 15 ans que nous nous connaissons. Je suis sa seule amie fille qui ait tenue si longtemps. Il faut dire, qu’elle n’est pas facile l’amie. Inconstante, jamais à l’heure, douée pour les plans foireux, les annulations de dernière minute, les excuses bidons et parfois même franchement bidons… la même qui n’est jamais satisfaite de ses cadeaux et qui finit toujours par les faire échanger. Bref… J’ai toujours mis tout cela de côté parce que je suis attachée à son amitié, parce qu’on a partagé beaucoup de choses à l’adolescence, parce qu’elle est un peu fragile. Parce que je l’aime beaucoup pour tout un tas d’autres raisons bien plus valables que ses défauts.

    Mais aujourd’hui encore je me demande si je ne suis pas un peu trop gentille… Depuis que j’habite ici elle n’est venue me voir qu’une fois. Il y a trois ans. Ce n’est pas faute de l’avoir invité. Ce n’est pas non plus la distance puisqu’elle part volontiers avec son mari quelques jours sur Paris, Lyon, ou en Italie. Mais ici, c’est vrai, c’est beaucoup moins glamour. Sa réaction il y a trois ans me l’a fait clairement comprendre (était-ce utile ? Je sais parfaitement que ce n’est pas un endroit fantastique). A l’occasion d’un week-end que nous avons partagé il y a quelques semaines, et fortes du plaisir que nous avons eu à passer tout ce temps ensemble, nous avons fixé une date plus d’un mois à l’avance pour que le petit couple puisse venir passer un week-end chez nous. Envie qu’elle voit la maison qui a tellement changé, qu’on partage encore un peu de temps ensemble....

    Nous avons choisi le premier week-end de mai. Parce qu’il y a trois jours et que ça permet de profiter pleinement sans avoir à courir sur la route. Elle me rappelle en début de semaine. Il y a cette même semaine une méga braderie à Paris blablabla. Je ne comprends pas bien : les dates n’empêchent pas leur venue. Et user de l’argument que cela fait cher de monter à Paris pour redescendre dans le sud puis remonter chez moi ne prend pas. Ils sont loin d’être à plaindre à ce niveau et même si c’était le cas, alors pourquoi aller dépenser dans une braderie à Paris ? Mais je sens déjà la fille qui cherche une excuse. Je lui confirme avoir bloqué de mon côté ce week-end là, n’avoir rien prévu, attendre leur venue pour le samedi matin (sachant qu’ils n’arriveront pas avant midi de toute façon).

    Hier soir, 23h. Le téléphone sonne. Toujours une angoisse qui monte quand le téléphone sonne à cette heure. C’est l’amie. Ah. Il se trouve que les dates de la braderie ne sont plus en semaine mais le vendredi samedi dimanche et il se trouve que la grand-mère de son mari fête son anniversaire le dimanche alors ils veulent bien venir quand même mais seulement le samedi pour repartir le dimanche matin parce qu’ils sont obligés d’aller voir la mamie le dimanche sinon cela va faire un drame et blablabla… Il est 23h. Je n’ai pas envie de tergiverser. Pas envie de discuter. Ni de chercher des solutions. Je suis profondément déçue et je lui dis que je ne veux pas leur faire faire 5 heures de route pour passer juste une soirée avec nous… Merci et bonne nuit. Et le pire, en raccrochant, c’est de devoir supporter le « je te l’avais bien dit. J’étais sûr qu’ils ne viendraient pas » de mon homme qui me nargue avec son petit sourire en coin. Et voilà. J’ai trois jours totalement libres maintenant. Et une tristesse au fond du cœur.

    Alors maintenant, je fais quoi ? Comme d’habitude ? Je passe à autre chose en gardant le vague espoir qu’un jour peut-être elle viendra me voir ? J’abandonne l’idée qu’un jour elle vienne me voir ? Je lui propose une nouvelle date ? Je lui demande qu’elle me propose une nouvelle date ? Je la rappelle pour lui dire que j’en ai marre de ses excuses bidons et je me fâche tout rouge au risque de la perdre ? Les votes sont ouverts…

     

     

     


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  • Le réveil a sonné depuis un quart d’heure pour mon homme et je n’arrive pas à me rendormir. Il parle au téléphone et sa voix bourdonne depuis la cuisine jusque dans mon oreiller. En cet instant précis je le maudis. Je maudis sa façon tonitruante de parler au téléphone. Je déteste le bruit le matin quand j’ai encore un peu de temps pour dormir. De toute façon, il est temps que je me lève. Que mon lit est douillet. Mon oreiller est si confortable. C’est si doux. Pas envie de me lever. Pas de motivation. Ce boulot n’est pourtant objectivement pas moins bien que les autres. Pourtant, presque tous les matins, je dois me forcer à me tirer des draps. Je dois mentalement me rappeler quelle chance j’ai de n’avoir qu’un quart d’heure de voiture à faire pour m’y rendre et de pouvoir dormir jusqu’au dernier moment, d’avoir tranquillement accès à internet dans la journée, d’être en compagnie d’une équipe somme toute assez sympathique malgré quelques débordements de blagues machistes et malgré la rétention d’information qu’ils pratiquent sciemment compliquant ainsi mon job.

    J’ai besoin de vacances. Besoin de soleil. Envie de soleil. J’imagine sa chaleur caresser mon visage. C’est le printemps. Il n’est donc plus très loin. Bientôt, oui, bientôt… Oui mais d’un coup cette pensée là me fait penser qu’il faudrait que j’aille faire vérifier quelques vilains grains de beauté. Je ne voudrais pas non plus me retrouver toute balafrée comme Monsieur Y. vu ce week-end qui vient de se faire retirer un petit mélanome et qui n’a désormais plus du tout le droit de s’exposer au soleil… Un truc pareil, moi, ça me rendrait folle. Depuis toujours je ne vis que dans l’attente de l’été, du soleil… Vite me sortir cette pensée de la tête, vite effacer la vision de ce visage défiguré par l’opération. Vite vite. Marre de ces mauvaises nouvelles tout autour de moi.

    La semaine va être difficile au boulot. Beaucoup de tensions. Beaucoup de travail. Je ne sais pas encore où je vais puiser la force d’arriver au bout sans craquer, sans envoyer tout le monde balader. Ne pas craquer non. Etre méthodique. Passer le temps qu’il faudra sur ce dossier que je dois rendre. Traquer l’information en douceur pour ne pas braquer les autres contre moi. Demander qu’une secrétaire vienne enfin me remplacer pour accomplir les tâches ingrates qui m’exaspèrent de plus en plus. Lancer le recrutement puisque ce poste est déjà budgété, alors pourquoi s’en priver ? Et dans quelques mois, demander une augmentation. Oui mais pour ça, être efficace d’abord. Ne pas craquer. Rester professionnelle. Garder la tête haute. Sourire. Enlever ce masque triste et fatigué que je porte depuis quelques jours. Retrouver l’énergie…

     


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