• Un dimanche à la campagne

    Après l'accrochage du samedi, le dimanche ressemblait au calme avant la tempête. Une promenade décevante dans le paté de maison du coin en réponse à ma demande "d'aller balader", un échange virulent sur l'état de nos comptes en banque et une réflexion déplacée de mon homme, regrettée aussitôt mais qui allume la mèche. Dispute. Qui se termine de ma part par un "ça ne peut plus durer comme ça". Lui dans son coin, moi dans le mien. Je me dis qu'il faut qu'on en finisse avec ces disputes interminables et ces discussions à répétition qui ne portent jamais autant de fruits que je l'espère. Parce que le naturel, le sien, le mien, revient au galop. Flot de reproches. Je monte et me plante dans le dressing. Je regarde mon sac à dos, pendant de longues minutes et me dit qu'il faut que je parte, que j'aille prendre l'air, que j'aille passer la nuit ailleurs... Il n'est que 15h. Et je suis là, plantée. Je n'arrive pas à bouger. Je suis figée. Je n'arrive pas à partir. Pourquoi ?

    Parce que d'abord, tout bêtement,  je ne sais pas ou aller et que l'option hôtel n'est pas la meilleure, ni psychologiquement, ni financièrement.
    Parce que je ne le sens pas. Je ne me sens peut-être pas, cette fois là, assez "au fond du trou" pour avoir la force de partir
    Parce que je n'ai pas encore fini de vider mon sac et que je tiens à tout dire même si ce n'est pas la première fois
    Parce qu'au fond de moi, j'ai toujours l'espoir d'un "nous deux" plus harmonieux
    Parce que j'ai l'habitude de ces épisodes de crise ?
    Je n'en sais rien. Mais si je n'y suis pas arrivée, c'est que ce n'était peut-être pas encore le bon moment.

    Longtemps après, un pas de lui vers moi qui ne répond pas. Puis après encore, je vais m'assoir à ses côtés pour remettre, une fois de plus tout à plat. Je dis ou redis tout ce que je ne peux plus supporter. Il argumente encore et encore. Je lui répond que ça suffit, tout ça c'est un dialogue de sourds, que jamais il ne m'écoute, ni n'accepte que je ne sois pas comme les autres femmes de ses collègues. On discute assez calmement. Pour une fois, c'est lui qui me dit "ne crie pas quand tu parles". Je ne suis pas encore convaincue que ça changera quelque chose. Peut-être à réactiver sa prise de conscience que je suis mal et que dans cet état, je ne resterais pas ici très longtemps encore. J'ai encore redit clairement que ce n'est pas que je ne voulais pas d'enfant, mais que je ne pouvais pas envisager d'en faire quand, tous les trois mois, je me demande si je ne vais pas partir et tout plaquer parce que cette vie m'étouffe. Que je ne supporte pas qu'il me lance de méprisants "tu ne vas jamais au bout" alors qu'il ne montre jamais le moindre enthousiasme face à mes projets et ne me soutient pas. Surtout pas. Qu'un homme qui n'est pas capable de s'occuper de moi quand je suis malade parce que "ca le dégoute", ce n'est plus supportable pour moi... etc.

    Bref, aujourd'hui, je ne sais plus trop où j'en suis. Je ne sais pas si je dois encore espérer après tant d'années d'explications vives de ma part et d'infimes efforts du sien. Je suis un peu triste, un peu mal à l'aise le soir quand je rentre. Parce que j'ai du mal à retrouver, après cette ultime explication, le calme du quotidien "comme si de rien n'était". Parce que je suis fatiguée de me battre contre lui et contre moi. Parce que j'ai envie que ce soit lui qui se batte pour moi, pour nous. Et qu'il ne me lance pas un simple "de toute façon tu as déjà décidé" quand je lui demande "que fais t'on tous les deux ?".

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  • Il est 19h05. Je ne suis en retard que de quelques minutes à notre "soirée conviviale" de boulot. J'ai laissé mon homme à contre coeur à la maison. Les conjoints sont conviés mais si mon repas est pris en charge par la boite, le sien non. Donc le calcul, en ce moment, a été rapide. Pas 30 euros en poche à dépenser au resto pour une soirée qui ne seraient pas, par dessus le marché, la nôtre. J'essaie donc de me faire une raison et me dis que je vais passer une bonne soirée quand même, qu'il faut que j'en profite...

    Je suis agréablement surprise par l'endroit. Une terrasse cachée, ensoleillée, des transats, des rosiers et un terrain de boule... Notre directeur tient absolument à ce que nous faisions une partie. C'est dans la bonne humeur que tout le monde se prête au jeu. L'ambiance est sympathique et détendue. Une jeune femme s'installe à une table. Nos regards se croisent. Sourires. C'est une copine que je n'avais pas vu depuis longtemps. Je m'absente quelques minutes pour la saluer. Cela me fait plaisir de la voir, l'invite à venir cet été à la maison... et retourne à ma partie de pétanque.

    Quelques minutes plus tard, je sens du mouvement, de nouvelles personnes arrivent. Je tourne légèrement la tête... Petit prince est là. Il dîne avec cette copine et une autre fille, soeur ou amie de celle-ci. Compagnons de solitude. Il jette un regard vers moi et de toute la soirée évitera de tourner à nouveau la tête. Longtemps j'hésite. Dois-je aller le saluer ? Son attitude me laisse deviner qu'il m'en veut encore et toujours terriblement. Je suis obligée de passer devant leur table pour aller me laver les mains après la partie de pétanque. Je me résouds, même si ça doit paraître étrange à cette copine, à ne pas m'arrêter pour l'embrasser. Je murmure juste un "bon appétit" en passant. Durant le repas, je ne peux m'empêcher de lancer des regards vers leur table, de l'observer. Il ne sourit pas. Il parle peu. La tête souvent baissée. Il m'a l'air d'avoir pris quelques kilos, mais je me trompe peut-être. Il est tellement tassé sur sa chaise...

    Son attitude depuis le début de "notre histoire" et après me confirme dans le fait que ce ne pouvait pas être l'homme de ma vie malgré ses si nombreuses qualités. Il ne se bat pas. Il se laisse porter. Triste, toujours, depuis des années. Avant moi. Après moi. Je culpabilise toujours, c'est certain. Mais je suis passée à autre chose et lui, s'obstine à faire du sur-place. Côté coeur comme côté boulot d'ailleurs. Je ne les vois pas partir. Je tourne la tête et la table est vide. Je regrette presque d'avoir "raté cet instant" et n'avoir pas pu lui donner au moins un sourire. Quelques minutes plus tard, ses mots dans mon téléphone, reçus en triple exemplaire au cas où : "Toujours la même interrogation : est-ce te voir qui est le plus dur ? Ou te savoir si loin ? Dans les deux cas ça fait mal... Bonne fin de soirée à toi titi". Je n'ai pas répondu. Je ne peux rien répondre. J'ai effacé ce message dès ce matin. Cela fait 1an et demi que tout est terminé. Il faut que lui aussi apprenne à tourner la page...

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  • Ni triste, ni gaie,
    Ni bien, ni mal
    Fragile petit animal

    Etrange sensation
    Vidée de toute émotion
    En suspens
    Je traverse le temps

    Flotaison d'incertitudes

    Juin s'est envolé
    Pour faire place à l'été
    Que j'attends
    Impatiemment.

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  • Je ne sais pas comment résumer cette conversation. Probablement comme les autres. Une joute argumentaire épuisante.

    Lundi soir, dîner sur la terrasse, sans télé, sans musique, juste lui et moi. Je profite du calme pour orienter petit à petit la conversation vers sa cousine, le courage qu'elle a de faire actuellement pour son stage 4h de route par jour et l'admiration que j'ai de leur couple de savoir tout remettre en cause pour elle, pour qu'elle puisse ensuite trouver le job à la hauteur de ses sacrifices. Lui : "évidemment, ils ont fait un mauvais choix au départ en s'installant là-bas ! C'est trop loin de tout". Pour lui, la comparaison n'existe pas puisque NOUS nous sommes BEAUCOUP mieux situés, bien plus près de la grande ville qui m'attire... C'est certain, au lieu de mettre 2h le matin pour m'y rendre, de mon côté je ne mets qu'une heure trente. Soit pour un aller-retour 3h au lieu de 4... C'est mieux mais est-ce bien pour autant ? C'est certain aussi que si l'on considère seulement la distance sans embouteillage entre notre domicile et cette ville on est censé mettre encore moins de temps (mais qui part bosser en dehors des heures de pointe ?).

    Je dis que je me sens mal ici. Que je m'y ennuie. Il répond qu'il ne m'a jamais mis le couteau sous la gorge, que c'est moi qui ai choisi cet endroit et qu'à L. ou M. je m'ennuierais probablement autant étant donné que je n'y ai pas plus d'amis qu'ici. Je réponds que j'étais persuadée que nous ne trouverions pas dans nos tarifs ici et que je l'ai laissé cherché parce qu'il était devenu insupportable tournant en rond dans cet appartement comme un lion en cage réclamant plus de liberté. Mais que je n'imaginais pas que nous trouverions une maison aussi vite. Il ne se souvient pas avoir été invivable, dit que j'exagère. Il argue que de toute façon nous n'aurions pas les moyens d'habiter là où moi j'aimerais, que nous avons de la chance d'avoir cette maison. Il dit aussi que de toute façon je me lasse vite et que si ça se trouve, en partant habiter dans cette ville, au bout d'un an ou deux j'aurais ce même sentiment, cette même envie de partir encore ailleurs. Je réponds que je suis peut-être comme ça au fond de moi et que je n'y peux rien. Que je suis peut-être plus faite pour une vie un peu plus nomade... Il répond qu'alors j'ai tout raté, que je suis complètement à côté de la plaque. Il me regarde et ne comprend pas ce que je fais là si c'est une vie nomade dont j'ai besoin. Certes. Je n'en étais pas consciente tout simplement... Je réponds que j'ai toujours suivi les voies, les rails sur lesquels on m'a mise. Que je n'ai autour de moi aucune référence d'une vie "différente" et que je ne pouvais donc que difficilement envisager "autre chose" et puis qu'on évolue. Je sens que je n'ai pas d'argument "concret" sur ce thème, que c'est juste du ressenti et que le ressenti... Difficile à faire passer.

    Je passe sur le côté professionnel, argumentant que je ne trouverais jamais un vrai poste dans le secteur qui me branche à un salaire décent ici. Il dit que je me mets des barrières toute seule. Que je pars battue d'avance. Qu'il n'y a pas de raisons que je ne trouve pas (ah, et mettre une première fois 9 mois pour trouver un job correctement payé mais pas des plus passionnant puis 6 mois pour trouver un job précaire à peu près interessant et encore... mais payé à coup de lance pierre, ce n'est pas un signe que trouver un job intéressant et bien payé risque d'être du niveau de l'impossible ?). Il dit qu'il ne m'a jamais empêché de chercher du boulot dans cette ville et que je peux très bien y bosser si je veux. Evidemment, ce n'est pas lui qui se taperait les trajets. Il répond qu'il est sur la route toute la journée pour son boulot et qu'il va très souvent dans cette ville. Oui, mais son trajet fait partie de son temps de travail et cela fait toute la différence à mon sens. Pas au sien. Je l'ai fait pendant 2 ans, me levant à 6h30 pour rentrer le soir à 7h45, ayant encore le repas à préparer et la vaisselle à faire... Et j'avoue avoir du mal à envisager de recommencer à ce rythme, surtout si un enfant venait à compléter le tableau. Quant à chercher du boulot carrément ailleurs, il ne se souvient absolument pas avoir dit un jour, lorsque j'ai répondu à une annonce loin d'ici et que nous habitions pourtant encore en appartement "et comment tu fais si c'est toi qu'ils choisissent ? Je t'avertis, si tu pars, ce sera sans moi". Des menaces dont il n'a aucune mémoire mais qui moi, ont guidé mes pas pour ne pas en faire un de faux. Pour rester dans ce qui était "raisonnable" à ses yeux. J'ai fini en pleurant en disant que je voudrais seulement sentir chez lui "une porte ouverte" vers un possible "autre chose". Il dit que pour l'instant la question ne se pose pas donc à quoi bon se prendre la tête à la fois sur le passé que je ne fais que "ressasser inutilement" selon lui et sur des choses hypothétiques ? A quoi bon en effet...

    Ce matin, une sensation de malaise. Autant lui avoir "avoué" que j'étais mal depuis deux ans m'a soulagée, autant cette conversation là me renvoie à tout ce que j'ai raté. Comme si tout ça n'avait tenu qu'à moi et qu'il n'était pour rien dans mon malaise. Au fond ce n'est pas totalement faux. Je ne peux m'en prendre qu'à moi d'avoir été si faible. Je ne peux m'en prendre qu'à moi de ne plus savoir ce que je veux, ni quoi faire, ni où aller. Conversation stérile ? Inutile ? Aussi épuisante en tous les cas que la lecture de ce post un peu trop long...

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  • Vendredi soir. Cours de danse. Je me sens vide de toute énergie. Je me sens prête à craquer. Et à la moindre réflexion de la prof de danse... Je craque. Impossible de refermer la vanne qui s'est ouverte. Mes larmes coulent, coulent coulent. Elle me dit que ça fait bien un an qu'elle me trouve mal, que j'ai perdu ma petite lumière, qu'il faut que je fasse quelque chose, que j'accepte d'aller mal pour pouvoir aller mieux...

    Je rentre à la maison. Mon homme me demande si mon cours s'est bien passé. Je réponds un "mouais" pas convaincant. Il part dans son délire genre "si c'est pour te prendre la tête chaque semaine, tu vas arrêter la danse". Comme si le problème venait de là... Je lui réponds que ça n'a rien à voir avec la danse, même si c'est là que je craque systématiquement depuis quelques semaines. Que je ne vais pas bien, point. Il marmonne un "un jour ça va, un jour ça va pas pfff". Pas envie de cris, d'énervements, d'explications dans le vide. Je m'éclipse dans la salle de bains pour une bonne douche. J'espère quelques minutes qu'il viennent me réconforter là, maintenant, mais non.

    Un peu plus tard, je ne sais plus comment, je lui sors que de toute façon ça fait deux ans que je suis comme ça, et qu'il ne s'en rend même pas compte. Parce que je fais semblant d'aller bien. Parce qu'autour de moi, personne n'accepte que je puisse aller mal. Dès que je montre un signe de faiblesse, on me secoue, on ne comprend pas, mes parents changent de sujet de conversation quant à lui, il m'engueule. Du coup, je garde tout. Je fais semblant de sourire. Et comme une illustration, un peu plus tard dans la soirée, je parle d'autre chose, je fais "comme si", en espérant qu'il comprenne. Il me prend dans ses bras. Me serre fort. Me répète qu'il m'aime...

    Le samedi soir, il évoque nos vacances aux USA de l'an dernier, me dit qu'il n'arrête pas d'y penser. Que tout était bien, même le trajet en avion. J'en profite pour lui dire que de mon côté, le trajet en avion n'est pas un bon souvenir. "Ah bon ? Pourquoi ?". "Parce que j'ai pleuré pendant des heures. Et tu ne t'en ai même pas rendu compte". Ca fait du bien de dire les choses telles qu'elles sont. Même si je lui ai déjà dit qu'il avait été insupportable, que je lui ai déjà reproché son attitude maintes fois, là, ça l'a touché différemment, du moins je l'espère. J'ose espérer qu'il comprend que tout ça est plus profond qu'une simple crise de stress de temps en temps.

    M'être vidée m'a fait du bien. Le lendemain il fait beau, je me sens bien. Direction la piscine de ses parents, voir sa cousine et son bébé (encore un ;-)). Tout se passe bien, jusqu'au moment où ils évoquent un possible déménagement (et donc vendre la maison qu'ils ont fait construire récemment) pour lui permettre à elle d'accéder à un job intéressant. Là, ça me renvoit à nous, notre vie toute tracée dans laquelle il faut que je me débrouille pour trouver mes marques et m'adapter, son refus à lui d'aller au delà des limites du département pour me permettre à moi ce genre d'évolution professionnelle. Je sens encore comme une injustice. Et depuis, encore un gout amer qui traîne. Encore un peu de haine qui boue. Je crois qu'il n'y aurait même pas besoin de déménager pour que j'aille mieux. Je crois que ce qui me ferait du bien, c'est de savoir "qu'autre chose est possible si...". Avoir une porte ouverte. Savoir qu'on pourrait remettre notre vie en question si c'était nécessaire ou simplement si nous en avions envie. Le sentir capable de sacrifier quelque chose de son schéma parfait pour l'adapter au mien... Je commence à peine à comprendre la signification de "s'aimer, ce n'est pas se regarder l'un l'autre, c'est regarder ensemble dans la même direction". Si seulement j'avais compris plus tôt...

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